Orrimi, Partie 2
L’homme assis au coin du feu se rapprocha d’elle à pas feutrés et déposa délicatement une couverture sur son corps assoupi. Elle revenait de loin. Trop d’émotions en si peu de temps. Il savait combien le corps supporte mal de telles tensions sans réagir. Il savait aussi qu’elle comptait. C’était pourtant la première fois qu’il la voyait. Mais cette rencontre était prévue, même annoncée, en quelque sorte, si l’on y réfléchissait. Les conséquences d’un échec n’étaient pas envisageables. Il fallait la protéger, à tout prix. Il se surprit à replacer une mèche venue recouvrir en partie ses yeux clos, et son doigt frôla la tempe de la jeune femme endormie. Il sursauta.
Le contact si doux n’était pas responsable. Même s’il n’avait jamais senti peau si douce, si fine. Non, ce qui l’avait fait tressaillir, c’était l’électricité qui était passée entre eux, associée à une sensation indéfinissable. Il tremblait maintenant du besoin de toucher cette femme, de comprendre ce qui se passait, de juste ressentir de nouveau ce sentiment d’être à sa place ici, à veiller sur elle, à être à ses côtés.
Lorsque Asmund avait ouvert sa porte à cette inconnue, rien d’autre n’avait existé que ses yeux brillants, profonds. Au bout d’un long échange intense, ils avaient fini par baisser les paupières dans une parfaite synchronicité. Il avait levé les yeux pour l’observer entièrement. Les traits tirés, pâle comme si elle sortait d’un long séjour enfermé, elle frémissait au moindre bruit ou mouvement rapide. Sa tenue ne laissait rien deviner quant à ses origines, mais ses yeux et l’ombre d’un sourire quand ils croisèrent de nouveau leurs regards en disaient plus long. Il l’avait invitée à entrer, un peu surpris lui-même de laisser une inconnue passer le pas de sa porte alors qu’il accordait rarement son assentiment à des visites.
Il avait pris soin de remettre une bûche dans l’âtre, d’allumer quelques bougies, et de fermer les rideaux pour éviter les importuns éventuels. Elle s’était assise, hésitante, sur le bord du canapé, puis, petit à petit, avait baissé sa garde, lentement, tandis qu’elle balbutiait son histoire, et s’était installée plus confortablement. Il l’avait longuement écoutée, fasciné par ses regards profonds et lumineux qui semblaient lui parler bien davantage.
D’où venait-elle ? Impossible de le lui faire dire. Elle lui avait expliqué avoir trouvé son chemin vers lui très facilement, mais après un long voyage. Peut être ce voyage était-il responsable des ombres dans son regard couleur d’océan. Elle avait fini par dire qu’elle le connaissait, d’un drôle de ton. Asmund avait beau ressentir la même impression, puissante, il était incapable de dire quand il s’étaient connus, et il était certain qu’il n’aurait jamais pu oublier ce regard. Tout cela semblait absurde et pourtant plein de sens, curieusement.
Le feu ondulait dans le foyer, créant une lumière douce dans la pièce, aux danses apaisantes. La quiétude les entoura bientôt. Asmund trouva naturel de lui narrer un récit venu du fonds des âges, presque un conte. Il y était question d’un monde en quête d’eau, comme toujours. Gaïa avait tant de légendes liées à l’eau qu’il n’était pas difficile de puiser dans ces récits d’espoir et de leçons de vie.
L’inconnue sans nom avait accepté le sommeil, lasse sans doute d’avoir tant couru, d’avoir tant cherché.
Il ne put résister et caressa, aussi légèrement que possible, sa joue… Elle émit un soupir et ouvrit les yeux d’un coup. Asmund surpris tant par son geste que par le réveil de son invitée, avait toujours son doigt en contact. Elle posa sa main dessus, et leurs regards emplirent l’univers de vie. Plus rien d’autre n’était.
– Mon nom est Lorreem. La voix était d’une infinie douceur.
– Bien. Vous avez un nom, c’est un bon début, Lorreem. Reposez-vous, je suis là : vous ne craignez rien. Il marqua une hésitation, pas très sûr de pouvoir expliquer ce qu’il s’apprêtait à dire. Je veille sur vous.
– Je me souviens d’un navire… mais c’était il y a tellement longtemps. Qu’ai-je fait depuis tant d’années à part vous chercher ? Qui suis-je ?
– Nous trouverons, ensemble. Ce mot prit de l’ampleur dans la petite pièce, il emplit l’air comme s’il était palpable, et leurs regards se croisèrent de nouveau, comme s’ils en savaient bien plus que leurs consciences.
©MaïmGarnier ~ Nouvelle inédite, seconde partie ~ Orrimi : L’homme au coin du feu (15/07/2016 -reprise le 26/11/2016)
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